La relation amoureuse est le berceau de l’épanouissement et du bien-être
Israël est en relation avec Rose depuis plus de 25 ans, quelques années après le décès de sa femme. Dévasté par cette perte, la relation avec Rose lui permet de retrouver un nouveau sens à sa vie. Avec Rose ils se lancent dans des aventures. Il a du plaisir! Israël profite de sa vie. Il se sent important et aimé. Il vieillit ainsi en gardant le cœur jeune et ça vaut cher pour lui. Rose a une soif de vivre et malgré les craintes devant l’inconnu, elle finit par accepter, les bras ouverts, les propositions d’Israël et dépasses ses peurs. Main dans la main ils avancent et développent une relation dans laquelle ils s’offrent mutuellement ce dont ils ont profondément besoin. Le partage, le plaisir, la confiance, l’attention, la reconnaissance et l’affection. Ils se font régulièrement arrêter par les passants qui leur demandent de les prendre en photo. Ils inspirent l’idéal quand on pense à un couple âgé. Ils s’assoient sur les bancs publics, se parlent, discutent, rient, regardent les gens. Rose est élégante et fière d’être aux côtés d’Israël. De son côté, Israël donne de la valeur à l’unicité de sa compagne.
Les demandes continuelles d’une personne souffrante peuvent conduire à un stress pour celle qui lui vient en aide
Rose est aussi une femme anxieuse. Elle compte sur Israël pour se divertir et faire des sorties et des balades dans la ville. Elle se sent en sécurité avec lui. Rose vit de plus en plus de stress en vieillissant, en plus de la solitude dû aux restrictions liées à la pandémie. Israël ne peut plus la visiter et elle n’a plus la force de sortir. Son état se détériore. Elle cherche à être rassuré en appelant Israël. Une vingtaine d’appels par jour. Tantôt pour savoir s’il est temps de prendre son repas, tantôt pour savoir si elle doit prendre sa médication. Israël est témoin de sa détresse. Rose ne peut plus vivre seule chez elle.
À son tour, Israël souffre de voir sa compagne perdre ses capacités et souffrir du manque d’être entourée. Il a mal. Il se sent profondément impuissant. Il est incapable de répondre aux demandes quotidiennes de Rose. C’est trop pour lui. Il n’ose plus sortir de chez lui, de peur de recevoir un appel de Rose en détresse. Il a peur de manquer ses appels. Se retrouver sur la rue, et devoir rapidement déposer sa canne, sortir son téléphone de sa poche et appuyer sur le bon bouton pour prendre son appel. Ouf! Ça lui crée un stress important, surtout en connaissant l’urgence avec lequel elle tient à lui parler. Israël se sent pris. Il ne veut pas abandonner Rose, et en même temps, il est à bout de souffle.
L’importance de se faire aider pour sortir de l’impuissance et agir malgré la culpabilité
Heureusement, Israël n’est pas resté seul avec ce vécu souffrant et déchirant à la fois face à Rose. Le sentiment de culpabilité qu’il ressent à l’idée de poser une limite à quelqu’un d’important pour lui et qui souffre déjà, l’accable. Il se juge et ne sait pas quoi faire. Avec l’aide de sa fille, il réussit à partager ses inquiétudes avec la fille de Rose, et lui témoigner de la limite qu’il touche malgré sa volonté d’être présent pour sa mère.
Des décisions sont alors prises par la famille et Rose est déménagée dans un centre où elle reçoit le soutien sécurisant et constant dont elle a réellement besoin. Israël est maintenant soulagé. Quand il reçoit des appels de Rose, c’est avec plus de calme dans sa voix. Cette observation lui permet de réaliser qu’il a bien fait de prendre sa place auprès de sa famille. Il est même capable de prendre conscience que la limite qu’il ressentait était bien légitime et qu’au fond sa réaction démontrait bien l’étendue du besoin de support de sa compagne. Effectivement, son besoin d’être sécurisée ne pouvait être comblé en demeurant seule chez elle. Israël a la capacité à ressentir la valeur des bienfaits de sa décision sur l’état de Rose. Cette prise de conscience importante pose un baume sur la culpabilité qu’il ressent encore. Elle lui permet aussi de faire la paix avec la présence de ses limites et avec son besoin de les respecter pour continuer à vivre dans le calme.
Découvrir un moyen de répondre à ses besoins dans le respect de ses limites
Israël a même réussi à être clair avec Rose et dorénavant c’est lui qui l’appelle. À chaque jour à 18h il s’est engagé à l’appeler. Rose est rassurée et elle n’a presque plus besoin de lui parler plus de deux fois par jour. De cette manière, Israël est plus calme de faire ses sorties quotidiennes. En même temps, il sent aussi qu’il continue d’être présent pour Rose et de prendre soin d’elle. Il trouve ainsi l’équilibre dont il a besoin. Il répond à son besoin de calme en ne risquant pas d’être surpris par un appel de détresse de Rose, tout en ne négligeant pas son besoin de supporter et de témoigner son affection à celle qui l’accompagne depuis si longtemps.
Et vous, quels moyens prenez-vous pour oser prendre votre place et vous respecter dans vos limites?
Louise Tellier, TRA, Thérapeute en relation d’aide md
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